Mutation laitière en élevage bovin par Dr Aboly

THEME : MUTATION LAITIERE EN ELEVAGE BOVIN ?

AUTEUR : ABOLY BOSSON NICOLAS

• ENSEIGNANT –CHERCHEUR A L’UNIVERSITE PELEFORO GON COULIBALY DE KORHOGO ;
• CHEF D’ANTENNE DU PROJET D’APPUI AU DEVELOPPEMENT DE L’ELEVAGE EN COTE D’IVOIRE

INTRODUCTION

En Côte d’Ivoire, le système de productivité des races locales ne permet pas de satisfaire la demande des populations en produits laitiers, d’où une situation de dépendance vis-à-vis de l’extérieur en matière d’approvisionnement en lait. Face à ce handicap majeur de l’économie ivoirienne, la seule alternative qui puisse permettre l’augmentation sensible de la production laitière locale est l’amélioration du potentiel génétique des races locales par l’utilisation d’outils biotechnologiques. A juste titre, certains éleveurs ont identifié l’insémination artificielle comme un outil de choix pour pratiquer la mutation laitière en vue d’une meilleure productivité du cheptel bovin. Il s’agit de retenir les meilleures génisses issues du croisement de la race Montbéliarde à la vache locale N’dama pour la production laitière.

La présente étude a pour objectif général de déterminer le niveau de l’amélioration de la production laitière des vaches métisses.

 

MILIEU D’ETUDE

Le milieu d’étude est le District des Montagnes qui compte une population de 1 047 769 habitants en majorité rurale et à vocation agricole. Le climat de type Baouléen de régime équatorial est caractérisé par deux saisons sèches (une grande saison sèche de novembre à mars et une petite saison sèche de juillet à fin août) et deux saisons de pluie (une grande saison de pluie de mars à juin et une petite saison de pluie de septembre à octobre). Le relief est relativement monotone avec la présence de collines disséminées, de nombreux bas-fonds ayant des sols ferralitiques de sature et des sols hydromorphes.

ECHANTILLONNAGE

Sur un ensemble de 55 éleveurs de bovins naisseurs, 6 d’entre eux ont choisi de pratiquer la mutation laitière en vue d’améliorer les performances de production de lait des vaches. Il fallait connaitre le potentiel de production de lait des vaches locales. C’est pourquoi, 12 élevages de bovins naisseurs ont fait l’objet d’un tirage au sort dans le cadre de l’enquête. Il faut retenir que 120 vaches par espèce ont été suivies durant les périodes de lactation pour estimer la production laitière par vache.

 

SYNCHRONISATION DE CHALEURS DE VACHES

Les éleveurs ont adopté les techniques de synchronisation des chaleurs des vaches métisses (Montbéliarde x N’Dama) par l’utilisation de la méthode de PRID (composée d’un élastomère en silicone inerte contenant 1,55g de progestérone et d’une capsule de gélatine qui contient 10 mg de benzoate d’œstradiol). Le dispositif est introduit dans le vagin à l’aide d’un applicateur prévu à cet effet. Deux jours avant son retrait, de la Prostaglandine (PGF2α) est injectée en intramusculaire par vache. Il est conseillé de retirer le dispositif en tirant doucement sur la cordelette suspendue à la vulve au 9ème jour après la synchronisation.

INSEMINATION ARTIFICIELLE ET CONTROLE DE GESTATION DE VACHE

L’instrument essentiel pour l’insémination artificielle est le pistolet d’insémination dit universel pour la semence conditionnée en paillettes. Il s’agit de la technique recto-vaginale qui consiste à déposer la semence dans l’utérus des vaches métisses en chaleur.

Le contrôle de gestation de ces vaches a lieu à partir de 90  jours après l’insémination artificielle. Il consiste à pratiquer une palpation de l’utérus de la vache au travers de la paroi du rectum afin de constater d’éventuelles modifications pouvant caractériser une gestation (technique de la palpation transrectale).

COLLECTE ET ANALYSE DES DONNEES TECHNIQUES

Les enquêtes ont été menées sur l’ensemble des élevages bovins naisseurs du District des Montagnes. Une différence significative est apparue entre les productions laitières des vaches métisses et celles des vaches locales. Les données statistiques ont été effectuées à partir du logiciel STATISTICA version 7.1.  Les  comparaisons  des  paramètres  de production  ont  été  réalisées  en utilisant le Test U de Mann-Whitney.  Le seuil de significativité a été fixé à 5% (p < 0,005).

Les vaches métisses (Montbéliarde X N’Dama)  sur le pâturage artificiel

RESULTATS

La production laitière des vaches locales  est de 28 249,2 litres chez les N’dama et 57 290,4 litres chez les zébus contre 194 016 litres pour les vaches métisses. Les durées de lactation sont variées d’une espèce à l’autre. Elles sont estimées en moyenne à 177 jours pour les N’dama, 219 jours chez les zébus et 235 jours chez les vaches métisses.

Les productions laitières par vache locale sont de 1,33 litre chez les N’Dama et de 2,18 litres pour les zébus contre 6,88 litres pour les vaches métisses.

Type de vaches	Nombre de vaches suivies	Quantité de lait produit en litres	Durée de lactation en jours	Production moyenne par vache en litres
Vache N’Dama	120	28 249,2	177	1,33
Vache Zébu	120	57 290,4	219	2,18
Vache Métisse	120	194 016	235	6,88

 

La traite d’une vache métisse

DISCUSSION

La production moyenne par jour et par vache métisse est supérieure à celle des vaches locales. Elle est estimée à 6,88 litres pour une durée de lactation de 235 jours contre 1,33 litre pour la N’Dama et 2,18 litres pour les Zébus ayant une durée de lactation respective de 177 et 219 jours.  Ces résultats seraient en accord avec celui des auteurs (Coulomb et al., 1976) exprimant que la production laitière des Zébus est de 2 à 3 litres par jour et une durée de lactation de 7à 8 mois avec 500 à 600 litres par lactation. Par contre celle des N’dama est de 0,9 à 1,5 litre par jour et la durée de lactation varie de 5 à 6 mois avec 350 à 450 litres par lactation. Cela s’explique par le fait que la saillie naturelle ne favorise pas un gain de lait, mais plutôt des pertes, surtout quand la lactation n’est pas encore achevée. En revanche, les auteurs tels que Butin et Diokane (2000) rapportent que la production chez les vaches métisses issues du croisement de N’dama à Montbéliarde est en moyenne de 12 à 14 litres et de 18 à 19 litres chez les métisses Gobra croisées à la Montbéliarde. Pour la synchronisation des chaleurs au niveau des fermes laitières, il a été enregistré 82,5 % de taux de réussite. Ce taux obtenu est dû au fait que le protocole PRID associé au PMSG est peu maitrisé par les inséminateurs. Il faut reconnaitre que Diadhiou (2002) a observé un taux de 100% chez les métisses dans le cadre du projet PAPEL à Dakar au Sénégal avec le protocole de PRID associé au PMSG.  En ce qui concerne la gestation des vaches métisses inséminées, le taux de gestation de 88% a été trouvé. Ce qui est supérieur aux données de Abonou T.F. (2007) qui a obtenu le taux de 57,1% pour les taurins N’dama croisés à la Montbéliarde. Il est à noter que Ibrahim laminou (1999) a obtenu un taux de gestation de 94% pour les mêmes métisses N’dama croisées à la Montbéliarde à Dakar.

CONCLUSION

La production de lait par vache métisse  et par jour a été estimée à 6,88 litres en 235 jours contre 1,33 litre chez les N’dama et 2,18 litres pour les zébus respectivement en 177 et 219 jours de lactation. En effet, pour la synchronisation des chaleurs, il a été enregistré un taux de réussite de 82,5%.  En ce qui concerne la gestation des vaches métisses, le taux de 88% a été obtenu. Force est de constater que l’une des techniques d’amélioration de la production laitière en élevage bovin est la pratique de la mutation laitière. Il s’agit de choisir les vaches métisses issues du croisement de la Montbéliarde à la N’Dama bénéficiant de l’insémination artificielle dans les fermes. Malgré l’augmentation sensible du litre de lait par vache métisse à la traite, les productions de lait demeurent faibles pour satisfaire les besoins de la population.

Source :https://nasopresse.com/np-mutation-laitiere-en-elevage-bovin-par-dr-aboly/